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HUNTER :
person that seeks out and kills or captures game

Hell is empty. And all the devils are there. ” ▐ PRENOMS ET NOM - Hunter, Prince, Widlow. Une explication s'impose sans doute, puisque les prénoms que m'accordèrent mes parents biologiques ne sont guère très courants, tout autant que le patronyme qui les accompagne n'est pas vraiment le mien. J'ai toujours considéré mes parents comme des mégalomanes avides de richesse mais considérablement bons à rien, et ces derniers dans leur besoin de reconnaissance sociale passablement ratée, m'affublèrent de ces prénoms-ci, persuadés qu'ils me mèneraient dans les plus hautes sphères de la société. Car je l'avoue, mes géniteurs ne brillant guère par leur culture se rapprochant du nombre chaotique de zéro, ils demeuraient persuadés que les hautes sphères n'étaient habitées que de gens orgueilleux s'appelant Prince ou autres Narcisse, plutôt que Charles ou Edward... Je ne suis pas convaincu de leur logique implacable -ironie, quand tu nous tiens -. Widlow est en réalité le nom de mon père adoptif, et cela me surprendrait de vous entendre dire que ce dernier ne vous dit rien. Grand avocat de la cour de Londres, il officie pour les plus riches de ce monde ; réputé dans la sphère moldue, il est néanmoins inconnu du monde magique. J'ai préféré porter son nom, non pour le blason doré qu'il apporte, mais parce que je me sens plus fils de ce dernier que de mon père véritable. Je porte donc le nom de Widlow, mais je suis né Sorrow. ▐ CARACTERE - surdoué , "gentleman", élitiste , mystérieux, violent, posé, paradoxal, sombre, fêtard, perfectionniste, cynique, exigeant, ambitieux, railleur, excessif, égocentrique, indépendant, passionné, peu bavard, volage ▐ LIEU ET DATE DE NAISSANCE - Chicago, Illinois, deux février 2028 ▐ ORIGINES - sang-mêlé ▐ AUTRE - Adopté et vit à Londres depuis l'âge de quatorze ans.

♣ STORY OF A LIFE TIME

• I. dirty little child


Des rires malsains, des gloussements pervers, je sentais mon pouls s'accélérer dangereusement, pour sûr, mon myocarde allait lâcher. Je me pinçais les lèvres avec angoisse et à la fois une satisfaction malsaine comme mon regard noisette se posait sur le gamin qu'ils tabassaient à coups de barre de fer. Les ruelles des banlieues malfamées de Chicago n'ont jamais été sûres, et j'en savais quelque chose ; cela faisait quatorze ans que je connaissais les moindres recoins crasseux de ces quartiers de débauchés, où putes et dealers se côtoyaient de jour comme de nuit. Notre quartier, on l'appelait "El little Mejico" ; dans un argot passablement moyen mêlant le portugais à l'anglais... Parce qu'ici il n'y avait ni foi ni loi. Les gamins de sept ans ne jouaient pas aux petites voitures, pas plus que les fillettes s'adonnaient aux joies des maternités factices en trimballant leurs poupées. Non, ici les gamins suivaient leurs grands frères dealers qu'ils prenaient comme modèles, ou marchaient dans les pas de leurs grandes soeurs aux jupes définitivement trop courtes et aux talons vertigineux. Ici, ne pas faire partie d'une bande et en être le bizut, c'était crever la bouche ouverte avant d'avoir atteint la majorité. Les lois de la jungle citadine sont dures, plus encore lorsque les beaux quartiers ne sont pas si loin que cela des ghettos... Les rires de mes amis s'amplifiaient alors que leur victime ensanglantée poussait des gémissements, les bourreaux imitant avec raillerie cruelle les plaintes d'agonie du gamin étendu à terre ; parce qu'il n'avait pas payé sa dose de coke à temps comme promis, les caïds de mon groupe estimèrent que le passer à tabac était son dû : il paierait par le sang. Il devait avoir quinze ans, j'en avais seulement quatorze lorsque la petite bande à laquelle j'appartenais était plus âgée. Celui qui encourageait le tortionnaire à cogner le bizut encore plus fort à coup de barre de métal en scandant des "frappe ! frappe !", s'appelait Jimmy. Un gros caïd de dix-huit ans qui m'avait pris sous son aile, parce que j'étais le rejeton d'un violeur abject et que dans la tête de ces gamins prépubères, c'était "cool". Encore et encore, ils s'acharnèrent sur leur victime, pauvre bizut parcouru de spasme qui était devenu la cible d'un jeu cruel, parce qu'il avait n'avait pas payé à temps le chef de bande, Joshua. Baraqué, dix-neuf ans, un tatouage grossier sur le bras et un vocabulaire restreint. Je m'allumais une cigarette, paraissant indifférent à cette scène abjecte qui en vérité demeurait mon quotidien, d'où mon attitude posée, recrachant un nuage de fumée lorsque je vis Jimmy se tourner avant de me fourrer un bidon d'essence dans les bras.

— ben vas-y... fous lui ça sur la tronche, on va voir s'il crame avec une allumette, fit-il dans un rire nerveux et gras.
— t'es con ou quoi, on va pas le cramer sur place.
— pourquoi tu le ferais pas Sorrow, t'as la trouille ?
— parce que la chair humaine braisée ça empeste à des kilomètres à la ronde, abruti. Pour la discrétion tu repasseras, tout le monde sait qu'ici c'est notre terrain de jeu.

... Et surtout, je n'avais aucune envie de transformer en viande fumée ce pauvre type étendu à terre et encore vivant. Plus encore je savais que les caïds autour de moi n'avaient pas plus les tripes nécessaires pour le faire, c'était pourquoi ils me regardaient avec force, et pourquoi ils avaient décidé à l'unanimité de me fourguer le bidon d'essence ; moi, Hunter Sorrow, j'étais à leurs yeux un monstre d'indifférence , ce qui en plus de mon côté potentiellement cruel et gros dur, me conférait une popularité certaine dans mon ghetto. Mais cette fois je m'érigeais contre leur connerie, contre notre connerie en vérité, et refusais de me prêter à ce jeu sous prétexte que sans doute ils ne souhaitaient en vérité que rejouer une scène qu'ils avaient vu en film la veille avec Schwarzenegger ou tout autre monsieur muscle. Joshua n'eut d'autres réflexes que de s'emporter ; en tant que chef de bande il ne pouvait accepter une rébellion de ma part, et encore moins lorsque celle-ci était agrémentée d'un "abruti" rétorqué dans un sourire. Par ailleurs ce dernier ne m'avait jamais vraiment aimé, trop grande gueule, trop assuré, plus intelligent et rusé que la petite bande -ce qui en passant n'était guère difficile- ; j'étais un rival de poids, un potentiel adversaire quant à la revendication de sa couronne des ghettos. S'empourprant de colère, Joshua me sauta à la gorge, incapable de tenir une conversation mais véritablement doué pour communiquer par le poing, la bataille fut inévitable. Et alors que notre combat se fit véritablement violent, des sirènes retentirent au loin, agitant alors les troupes. Des injures proférées, de l'angoisse et de l'agitation ; la petite bande se dispersa bien vite au son de la sirène hurlante de la police américaine. Ils eurent le temps de s'enfuir lorsque moi, courbé en deux par un coup de poing donné par Joshua en plein dans l'estomac, peinait à tenir debout. Les autorités accoururent vers moi d'une rapidité étonnante, m'attrapant violemment par le col ils m'arrachèrent l'instrument de métal dont je m'étais emparé entre temps pour ma défense sanglante, pensant visiblement que j'avais été le tortionnaire du pauvre gosse étendu à terre pleurant son agonie... ce qui était vrai, en un sens, bien que quelque part j'avais été aussi son salvateur. Je me retournais une dernière fois sur l'impasse alors qu'ils me poussaient dans leur bolide, avisant la policière à la main douce venue s'accroupir auprès du bizut, et ce fut sans un mot que je suivis les autorités jusqu'à leur poste situé hors du ghetto.


***


— Hunter, c'est ça ?
— et vous êtes qui ?
— Mr Widlow.
— ça ne répond pas à ma question. fis-je d'un ton cinglant mais d'un naturel étrangement décontracté et provocant.
— je suis ton avocat, en quelques sortes... Je m'occupe des enfants à problèmes...
— je ne suis pas un enfant à problèmes.
— un témoin a tout vu Hunter...
— et alors, qu'est-ce que vous voulez que ça me fasse.

Une fois arrivé au commissariat, le premier réflexe des autorités fut de me pousser dans une pièce close en tête à tête avec cet homme au grand sourire, trop sincère à mon goût pour être vrai, le regard paternel et la parole patiente. Mais moi, dans mon attitude de méfiant sur ses gardes, je le narguais de mon regard froid et de mon attitude agressive et loin d'être coopérative. Je voulais simplement qu'on me relâche, qu'on me foute la paix, et qu'on ne vienne plus m'emmerder avec ces textes de lois qui ne régissaient pas même les ghettos. Je sentais néanmoins que cet homme m'avait déjà pris en affection alors qu'il me fit poliment signe de m'asseoir et qu'il commença à me sortir son baratin sur sa morale et mon bien être. Quelque part, je lui en étais reconnaissant , il me voyait comme un gamin paumé, ce que j'étais en vérité, et non pas comme de la mauvaise herbe irrécupérable. D'un autre côté je ne pouvais m'empêcher d'avoir de temps à autre ces sourires en coin narquois ; qui était-il pour me faire la morale, lui qui sans doute avait une belle maison, un magnifique bagnole et une femme superbe... Moi je n'avais rien, si ce n'était un taudis, une mère alcoolique, un père violeur que je n'avais pas vu depuis des lustres, et un jeune frère que je protégeais non sans imposer une certaine distance. Son discours semblait se terminer, lorsqu'évasif et distrait malgré la gravité de la situation, mon regard se posa sur une feuille volante ; sans gêne et assuré, je m'en emparais avant d'en lire l'étrange résumé : « Possédant initialement un couple de lapins, combien de couples obtient-on en douze mois si chaque couple engendre tous les mois un nouveau couple à compter du second mois de son existence ? » . J'arquais les sourcils sur l'étrange question lorsque Mr Widlow s'empressa d'ajouter dans un sourire.

— ah, ne fais pas attention à ça, c'est Matt, un collègue de bureau qui nous met au défi de résoudre ce charabia... une longue histoire. rajouta-t-il face à mon scepticisme.
— ouais c'est.. fun. Vous devez avoir beaucoup de boulot pour vous prendre la tête avec ce genre de choses. murmurais-je d'un ton mi moqueur mi amusé.
— ... et j'aurais beau avoir toute la bonne volonté du monde, le résultat devrait être...
— cent quarante-quatre. fis-je en haussant les épaules avant de lui rendre le papier, non sans avoir installé au préalable un silence de réflexion.
— pardon ? fit-il alors intrigué par ma rapidité exemplaire.
— ...cent quarante-quatre. répétais-je avec détachement. Notons Fn le nombre de couples de lapins au mois n. Jusqu’à la fin du deuxième mois, la population se limite à un couple, ce qu'on note F1 égal F2 égal un ... Je m'arrêtais alors, conscient que l'avocat abasourdi ne comprenait pas grand chose à mon étrange langage, aussi j'entrevis de faire simple. ... le nombre d'or... la suite de Fibonnaci... C'est facile quand on a pigé le truc. rajoutais-je modestement avant de détourner le regard, préférant finalement passer à un autre sujet.
— Hunter, bordel, qu'est-ce que t'as encore foutu ?

L'entrée brutale de ma propre mère dans le bureau acheva la surprise et la déconvenue de Widlow. Etonné, il tourna son regard vers ma mère, une femme blonde mal fringuée et le regard assassin, avant de reposer ses prunelles sur moi, qui préférais autant éviter son oeillade inquisitrice, mal à l'aise.

— j'espère que vous allez le foutre en taule...
— non madame Sorrow, ne vous en faites pas, nous relâchons votre fils...
— ben vous devriez pas. La taule c'est tout ce qu'il lui faut pour qu'il arrête ses conneries. Tu vas me rendre folle, merde, tu veux ressembler à ton pervers de père c'est ça ? Allez bouge-toi putain !

Avisant, presque docile étrangement, Mr Widlow qui m'avisait d'un air à la fois éberlué, outré et compatissant, je finis par me lever et suivre mon alcoolique de mère empestant le whisky, les larmes au bord des yeux, prête sans doute à prendre le volant. La rédemption n'était pas pour moi, et je quittais ainsi le bureau du premier être qui m'avait tendu la main.